Un secret millénaire pour un arrosage intelligent : l’oyas
Dans le monde du jardinage, rares sont les solutions qui allient simplicité, efficacité et respect de la nature. Pourtant, l’oyas (ou « olla » en espagnol), un système d’arrosage ancestral venu des régions méditerranéennes et d’Asie, coche toutes les cases. Peu connu du grand public mais chéri par les adeptes de la permaculture, ce petit récipient en terre cuite est en train de révolutionner nos potagers… en silence.
Mais comment un pot en argile enterré peut-il nourrir efficacement nos plantes, tout en économisant jusqu’à 70 % d’eau ? Découvrons ensemble cette pratique aussi ancienne qu’ingénieuse, et comment elle s’intègre parfaitement dans une démarche de jardinage durable.
Qu’est-ce qu’un oyas exactement ?
L’oyas est un récipient en terre cuite non vernissée, généralement en forme de jarre ou de boule, que l’on enterre jusqu’au col à proximité des plantes. Une fois rempli d’eau, il diffuse progressivement l’humidité dans la terre environnante, par simple capillarité. Pas de pompe, pas d’électronique : c’est le sol et les racines qui « boivent » en fonction de leurs besoins.
Cette technique ancienne aurait vu le jour en Chine il y a plus de 2000 ans avant de se répandre dans les zones arides d’Afrique du Nord, du Moyen-Orient et d’Amérique Latine. Aujourd’hui, dans un monde où la ressource en eau devient de plus en plus précieuse, ce retour aux sources a quelque chose de profondément sensé.
Comment ça fonctionne ?
Le principe est à la fois simple et redoutablement efficace. La terre cuite est un matériau microporeux. Cela signifie que l’eau qu’elle contient s’échappe très lentement à travers les parois, mais uniquement lorsque le sol situé autour est plus sec que l’intérieur du pot. Ainsi :
- Si le sol est déjà humide, l’oyas retient son eau.
- Si le sol s’assèche, l’eau s’échappe délicatement et targette les racines.
Résultat ? Un arrosage précis, adapté aux besoins réels des plantes, sans excès ni gaspillage.
Pourquoi adopter les oyas dans son jardin ?
On pourrait penser qu’il s’agit d’un simple gadget écologique, mais l’oyas mérite très clairement sa place parmi les outils essentiels du jardinier attentionné. Voici pourquoi :
- Économie d’eau significative : jusqu’à 70 % de moins que l’arrosage classique.
- Moins d’évaporation : l’eau est distribuée en profondeur, là où elle est vraiment utile.
- Aucun risque de sur-arrosage ou de stress hydrique pour les plantes.
- Réduction des mauvaises herbes : comme la surface du sol reste sèche, elles germent moins.
- Gain de temps : une seule recharge d’eau peut durer plusieurs jours, voire une semaine.
Et puis, soyons honnêtes : il y a quelque chose de très apaisant à venir remplir ses oyas à la fraîche, le matin, un arrosoir à la main, en regardant les abeilles danser d’un basilic à l’autre…
Oyas et permaculture : un mariage naturel
Si vous suivez ce blog depuis quelque temps, vous savez combien la permaculture me passionne. L’idée de créer un écosystème autonome, durable et harmonieux a quelque chose de profondément réjouissant — et de nécessaire. Dans ce cadre, l’oyas incarne une solution tout à fait cohérente : faible technologie, performances étonnantes, respect du vivant.
Utiliser des oyas, c’est libérer du temps pour observer, expérimenter, apprendre de notre jardin. C’est aussi cultiver dans une logique de sobriété heureuse : peu de moyens, mais des résultats durables.
Pour quels types de cultures sont-ils adaptés ?
Les oyas conviennent parfaitement :
- aux légumes de saison type tomates, courgettes, aubergines, salades…
- aux plantes aromatiques cultivées en pot ou en pleine terre
- aux plantes en bac ou en jardinière sur une terrasse ou un balcon
Chaque oyas diffuse l’eau sur un rayon d’environ 20 à 50 cm selon sa taille. Pour un carré potager par exemple, on peut facilement imaginer installer deux à quatre oyas, bien répartis. Celles et ceux qui ont testé vous le diront : cela transforme complètement la façon d’arroser… et les récoltes ne s’en portent que mieux !
Fabriquer son propre oyas : mission poterie ?
Vous le savez, ici on aime mettre les mains dans la terre — au propre comme au figuré. Et si vous testiez la création de votre propre oyas ? C’est une belle occasion de lier loisir créatif et utilité concrète.
Si vous avez accès à un atelier de poterie ou à du matériel de modelage, vous pouvez créer votre propre modèle :
- En utilisant une terre cuite naturelle non émaillée
- En façonnant une forme ronde ou oblongue, avec un col qui dépassera du sol
- En cuisant votre pot à une température suffisante pour assurer une porosité optimale (entre 950°C et 1050°C)
C’est un projet parfait pour les ateliers en famille ou entre amis à l’Atelier Salence — et quelle satisfaction que d’arroser son potager avec un objet fait de ses mains !
Et si on recyclait un pot existant ?
Pas de tour de potier à la maison ? Aucun souci. Vous pouvez détourner un pot de fleur en terre cuite, non peint et non verni. Il suffit de :
- Le boucher à la base (avec un bouchon en liège ou un simple galet collé avec de l’argile naturelle)
- Le retourner et l’enterrer la tête en bas, le col affleurant la surface
- Ajouter un couvercle simple (une soucoupe de pot fait très bien l’affaire) pour éviter l’évaporation et les moustiques
Ce n’est peut-être pas aussi esthétique que les modèles du commerce, mais l’efficacité est au rendez-vous.
Avis de terrain : les oyas testés et approuvés
Je me souviens très bien du premier été où j’ai opté pour les oyas. Un mois d’août étonnamment chaud, un agenda chargé, peu de temps pour l’arrosage quotidien… Et pourtant, au retour de quelques jours d’absence, mes plants de tomates affichaient une mine étincelante, feuillage vert foncé et fruits juteux à souhait.
D’autres jardiniers m’ont partagée leur enthousiasme :
- “J’ai installé trois oyas dans mon bac surélevé. Depuis, les salades poussent comme jamais, et je n’arrose plus à la va-vite en rentrant du travail.”
- “Les courgettes étaient magnifiques cet été. Un copain m’a demandé mon ‘truc’. J’ai juste montré les petits pots enterrés.”
Comme quoi, l’innovation, parfois, consiste davantage à réactiver des savoirs anciens qu’à chercher la toute dernière technologie connectée.
Quelques conseils pratiques pour bien démarrer
Si l’oyas vous tente (et il y a de bonnes chances que ce soit le cas, soyons honnêtes), voici quelques astuces pour une mise en place réussie :
- Entourez l’oyas de compost ou d’un paillis pour éviter l’évaporation à la surface du sol.
- Remplissez régulièrement (tous les 2 à 6 jours selon la météo et la taille de l’oyas).
- Nettoyez-le à la fin de la saison pour éliminer les algues ou minéraux qui pourraient obstruer les pores.
- Protégez-le du gel en hiver si vous souhaitez le réutiliser d’année en année.
Et surtout, observez. Vos plantes vous parleront : un feuillage plus dense, une croissance régulière, même en plein été… c’est le langage discret mais clair d’une plante bien hydratée.
Un geste simple pour une grande différence
Adopter les oyas, c’est faire un pas de plus vers un mode de vie respectueux, intelligent et ancré dans le réel. C’est embrasser une vision du jardinage fondée non sur la performance ou le rendement, mais sur l’équilibre, la créativité et le plaisir d’apprendre par l’expérience.
Et si, cet été, votre potager devenait un terrain d’expérimentation joyeux, entre terre, eau et céramique ? Un petit geste qui en dit long. Et qui, franchement, a tout pour durer.